Fort d’un ancrage local dans une centaine de territoires en France et à l’international, Réseau Entreprendre finance et accompagne des entrepreneurs à fort potentiel de créations d’emplois depuis plus de trente ans. La première implantation est née à Roubaix, en 1986, sous l’impulsion d’André Mulliez, à l’époque PDG du Groupe Phildar suite aux nombreux licenciements entraînés par le déclin du marché du fil à tricoter, dans le milieu des années 80. Son idée : « Pour créer des emplois, créons des employeurs ».
Nous avons rencontré Yasmine Hamraoui, Directrice de Réseau Entreprendre 93, l’association du département de la Seine-Saint-Denis, dont Altavia est partenaire depuis plus de 10 ans. C’est juste après l’implantation de l’association en Seine-Saint-Denis qu’Altavia a s’est engagé auprès du réseau, en tant qu’accompagnant auprès des jeunes entrepreneurs locaux. Aujourd’hui, c’est par le biais d’un mécénat de compétences que le groupe continue de soutenir Réseau Entreprendre 93, en contribuant à la création de ses outils de communication.
Entretien :
A quel moment l’association Réseau Entreprendre s’est-elle implantée en Seine-Saint-Denis ?
Réseau Entreprendre 93 est né il y a treize ans et couvre aujourd’hui tous les territoires du Département, qui nous soutient depuis le début et avec lequel nous avons tissé des liens forts. L’année dernière, plus de 50% d’entrepreneurs soutenus en Seine-Saint-Denis étaient installés en « Quartiers prioritaires de la Politique de la Ville. »
Réseau Entreprendre est aujourd’hui reconnue Association Utilité Publique depuis 2003 et maintenant présente partout en France et, depuis quelques années, à l’international, notamment au Maroc, au Chili, en Tunisie, en Suisse et en Belgique.
Comment ces associations, et en particulier Réseau Entreprendre 93, sont-elles structurées ?
Il s’agit d’associations locales de chefs d’entreprise. Ce sont donc des entrepreneurs et des dirigeants, qui se fédèrent à l’échelle d’un département, d’une région ou d’un pays, pour partager cette mission, commune à tous les Réseaux Entreprendre, qui est celle d’accompagner et de financer l’entreprenariat, avec comme cible des entrepreneurs à fort potentiel de création d’emplois.
Comment fonctionnez-vous en termes de financement ?
Ce sont les personnes que nous finançons grâce à des prêts d’honneurs (sans intérêts ni prise de garantie), par le biais de financement de la Région Ile-de-France, de la Caisse des Dépôts et de banques partenaires, et de garanties de la BPI. Nous prêtons des montants de 15K€ à 50k€ dans l’optique d’augmenter leur fonds propre et leur permettre d’aller chercher de l’argent auprès de banques, financeurs et business angels. Cette action représente un levier fort, puisqu’un euro prêté par Réseau Entreprendre permet d’en lever treize. C’est toute la force du réseau : cela fait 30 ans que nous existons et, avec le temps, nous sommes devenus un label pour les financeurs tiers, qui estiment que s’il est passé par le filtre et par l’accompagnement de Réseau Entreprendre, un entrepreneur aura deux fois plus de chances d’exister trois à cinq ans plus tard, avec un fort potentiel de créations d’emplois. Il s’agit d’un énorme enjeu économique dans un pays tel que la France, où beaucoup d’entreprises restent petites.
Et en matière d’accompagnement ?
Nous les accompagnons aussi bien dans la création, que dans la reprise. Cet aspect est essentiel, notamment en Seine Saint Denis, où bon nombre d’entreprises industrielles ferment, faute de repreneurs. Avec le temps, nous avons étendu notre champs d’action au-delà de le la phase de création ou de reprise, puisque nous continuons à accompagner un certain nombre de lauréats que nous avions soutenus au démarrage, dans leur développement. C’est le cas, par exemple, d’Arkose, dont les fondateurs ont créé une salle d’escalade de bloc à Montreuil il y a deux ans. Aujourd’hui à la tête de cinq salles, ils viennent de lever plus de 2,5 millions d’euros avec pour objectif de multiplier le nombre de ces implantations par quinze d’ici la fin de l’année. A ce stade, nous avons affaire à d’autres problématiques que celles que l’on rencontre au moment de la création. Ainsi, dans le cadre de l’accompagnement au développement, nous soutenons des entrepreneurs sur des problématiques de gouvernance et de croissance. Diriger une entreprise de 15 personnes ce n’est pas la même chose que 50, 300 ou 1000. Cela s’anticipe !
Réseau Entreprendre est ainsi un révélateur de talents : nous cherchons des pépites dont nous essayons de booster les capacités, et nous les aidons à passer du statut d’entrepreneur à celui de chef d’entreprise.
Quelles compétences sont-elles mises en œuvre pour aider les entrepreneurs à passer ce cap difficile ?
La grande spécificité du réseau c’est que l’accompagnement est fait par des chefs d’entreprises, qui sont eux-mêmes passés par toutes ces phases de développement. Nous ne cherchons pas seulement la compétence mais aussi et surtout l’expérience. Créer son entreprise et la faire grandir nécessite un certain nombre de connaissances qui ne s’apprennent ni dans les livres, ni dans les écoles de commerce, mais sur le terrain !
Concrètement, comment cet accompagnement est-il structuré ?
Chaque mois, l’entrepreneur rencontre un chef d’entreprise expérimenté. Il a par ailleurs une réunion mensuelle en Club d’entrepreneurs, qui lui permet de sortir de l’isolement en se réunissant entre pairs. Car être entrepreneur, c’est beaucoup de solitude ! Nous avons pour vocation à créer ce cercle de confiance, afin qu’ils puissent trouver des réponses à leurs problématiques entre eux, en toute confidentialité. Réseau Entreprendre permet aussi, lors de ces rendez-vous, de faire intervenir des experts externes, sur des sujets de RH, financiers, ou encore de gouvernance, pour les nourrir en termes d’expériences. Cet accompagnement dure de deux à trois ans, en fonction des besoins spécifiques de chacun. L’action du Réseau est très qualitative. De plus, les valeurs qu’il porte sont très fortes !
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les valeurs portées par l’association ?
Tout d’abord, nous estimons qu’au-delà d’un projet il y a toujours une personne, que ce soit des chefs d’entreprise qui accompagnent ou des entrepreneurs. Nous sommes très attachés à l’individu !
Ensuite, la gratuité : tout l’accompagnement que nous prodiguons est gratuit pour l’entrepreneur.
Enfin, nous sommes tous le maillon d’une chaîne. Nos lauréats reçoivent aujourd’hui et, un jour, ils donneront à leur tour. 20% de nos accompagnateurs sont d’anciens lauréats, et ce chiffre ne fait que grandir. Notre président est un ancien lauréat qui a créé son entreprise en 2008. C’est assez symbolique et cela incarne la valeur qui nous est la plus chère au sein du réseau : la réciprocité.
En termes de chiffres, quel bilan faites-vous de l’année écoulée ?
En 2016, nous avons reçu 500 sollicitations et nous avons soutenu 32 entrepreneurs de 20 entreprises différentes. Cela représente 80% de créations et 20% de reprises. 20% de nos lauréats 2016 sont des femmes. C’est en augmentation mais ce n’est pas assez ! Et nous travaillons pour essayer de faire grandir ce chiffre. Le facteur culturel joue encore beaucoup : les femmes osent moins, sont plus prudentes. Nous le constatons notamment dans les business plans que nous recevons. Dans la majorité des cas, on sait que dans un business plan envoyé par une femme, il faut systématiquement revoir les chiffres à la hausse !
La prudence et la détermination avec lesquelles les femmes conduisent leur projet impactent positivement la pérennité de leur entreprise. C’est pourquoi nous sommes d’autant plus attachés à accompagner des femmes.
L’entreprenariat au féminin, c’est aussi une question de modèle : plus nombreuses seront les femmes qui réussiront à monter de belles entreprises, plus elles seront visibles et plus nombreuses seront les jeunes à vouloir suivre leur exemple.
A titre personnel, quel profil d’entrepreneur vous intéresse particulièrement ?
Je dirais les profils d’autodidactes, de jeunes auxquels on ne s’attend pas forcément et qui ont une énergie et un talent fou ! En France, on a une forte tendance à favoriser certains parcours, certaines écoles…Mais le 93, c’est le département de la jeunesse et de la diversité ! Dès lors, un certain nombre de nos lauréats sortent totalement des cases. Cela montre que c’est aussi dans la diversité que l’on crée de la richesse et de l’innovation, et je crois que la France a besoin de s’en rappeler…
Quels sont vos objectifs pour 2017 ?
Plus de femmes, c’est évident ! Et plus globalement, nous avons bien entendu pour objectif de soutenir toujours plus d’entrepreneurs et de trouver plus de chefs d’entreprises, performants et bienveillants, pour les accompagner. Aujourd’hui, plus d’une centaine de chef d’entreprises sont engagés dans le 93 et à peu près 10 000 en France. Nous avons soutenu plus de 200 entrepreneurs en Seine-Saint-Denis et ce n’est que le début…
Enfin, nous souhaitons développer davantage les partenariats avec les grandes entreprises, tels que le beau partenariat que nous avons avec Altavia, qui nous accompagne depuis tant d’années, dans le cadre d’un mécénat de compétences notamment dans la création d’outils de communication pour le réseau.